Sao Paulo © bertrand desprez |
Un homme, assis au volant de sa voiture, attend devant un feu rouge. Il devient soudain aveugle. C'est le début d'une épidémie qui se propage à une vitesse fulgurante à travers tout le pays. En quarantaine dans un hôpital ou livrés à eux-mêmes dans la ville, privés de tout repère, les hordes d'aveugles devront faire face à ce qui, en l'homme, est le plus primitif : la volonté de survivre à n'importe quel prix. Guidés par une femme, le seul être qui n'a pas été frappé par la " blancheur lumineuse ", les personnages de ce magnifique et insolite roman connaîtront mille aventures. L'amour, la haine, la cruauté, l'indifférence, la peur, autant de passions qui nous aveuglent et à partir desquelles José Saramago bâtit une inquiétante allégorie des temps que nous vivons.
La lucidité
José Saramago disait "Ce que je cherche à exprimer, c'est l'indignation sur l'état du monde, c'est la misère, la détresse où vivent des millions de personnes. Une partie énorme de l'humanité vit dans une apocalypse permanente de la naissance à la mort. C'est ça le progrès ? C'est ça la civilisation ?" Blogueur impénitent, pourfendeur des injustices sociales et politiques, José Saramago était un énervé chronique, une voix contestataire de la littérature contemporaine qui avait trouvé en Internet le support idéal de sa liberté d'expression chérie. Petit-fils de fermiers illettrés, contraint d'abandonner ses études pour apprendre le métier de serrurier, il se lance sur le tard dans l'écriture. Une vingtaine de romans, quelques essais et pièces de théâtre plus tard, il est le seul lauréat lusophone du prix Nobel de littérature. Le Portugal pleure un géant des lettres et son meilleur ambassadeur dans le monde.
un film a été adapté du roman par Fernando Meirelles sous le titre "Blindness" et a reçu un accueil mitigé, notamment de la part des personnes atteintes de cécité.
La littérature et surtout la fiction n'est pas toujours évidente à adapter au cinéma (le film "La route" en est un exemple également)
Le film a été vivement critiqué par plusieurs organisations représentant la communauté des aveugles. Dr Marc Maurer , président de la Fédération nationale des aveugles , a déclaré: "La Fédération Nationale des Aveugles condamne et déplore ce film, qui fera un préjudice important à l'aveugle de l'Amérique et le monde." [38] Un communiqué de presse du Conseil américain des aveugles a déclaré: «... il est bien évident pourquoi les personnes aveugles seraient outrés par ce film. Les aveugles ne se comportent pas comme des barbares, des créatures animalisés." [39] La Fédération Nationale des Aveugles annoncé son intention de dans les salles au moins 21 Etats, dans la plus grande manifestation dans l'histoire de l'année.'s 68-organisation de piquetage [40] José Saramago a répondu: "stupidité ne choisit pas entre aveugles et non-aveugles." [41]
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Pour reprendre un jeu qui consiste à récupérer des brèves informations sur le net, voici ce que celà peut donner :
- De l'éblouissement à l'aveuglement, la limite semble actuellement bien ténue lorsqu'il s'agit d'évoquer l'or. L'irrésistible ascension du métal jaune ...La passion et l'aveuglement conduisent souvent à émettre des points de vue aussi inexacts que subjectifs sur l'appréciation et la résolution de difficultés ...Dans les cercles diplomatiques arabes et occidentaux, on critique l'aveuglement d'une opposition qui sacrifie les intérêts de la population, ...
... à la fois la crise économique et l'aveuglement des politiques publiques depuis trente ans. Chômage de masse, déclassement, logement impossible, suicide… ...
Un pastoralisme de plus en plus menacé par l'aveuglement des administrations parisiennes ou bruxelloises
A l'aveuglement de l'homo sapiens, dont la rationalité manque de complexité, se joint l'aveuglement de l'homo demens possédé par ses fureurs et ses haines. ...(Edgard Morin)
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Florence © bertrand desprez
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- Puis pour revenir vers l'image, celle qui nous aveugle .. la photographie et ses histoire incroyables, ses auteurs inconnus, reconnus, parfois discret et silencieux, parfois tonitruant et médiatisé à outrance.
- Voilà deux ou trois histoires qui touche le monde des aveugles et parle un peu de l'aveuglement :
Evgen Bavcar Ingénieur à l'IEAC et photographe: "Il faut distinguer le visuel, ce que voient nos yeux, du visible, ce que voit notre esprit."
© Evgen Bavcar
«À 12 ans j'étais amoureux d'une jeune fille qui portait ses cheveux noués en une longue queue de cheval. Je me suis plongé dans sa chevelure et je n'ai depuis jamais trouvé la sortie. » Evgen Bavcar s'amuse à raconter cette petite histoire poétique inventée lorsque, un peu agacé par la récurrence de la question, on lui demande comment à l'âge de 12 ans il est devenu aveugle. Une marque de l'originalité de ce personnage qui, comme pour relever le défi de son handicap, a fait de l'image sa spécialité et de la photographie son œuvre. Naturalisé français, cet artiste slovène expose un peu partout. Diplômé de philosophie, il est souvent convié à s'exprimer sur le statut de l'image. C'est en effet à ce sujet entre autres1 qu'il se consacre depuis 1976 au sein de l'Institut d'esthétique des arts contemporains (IEAC) à Paris. Mais son intégration administrative n'a pas été simple, même si, « pour les directeurs successifs de l'Institut, ma cécité n'a jamais été un problème. Et pour cause : en sciences humaines, l'acceptation que tout homme est handicapé dans son corps et dans son esprit est le point de départ de toute réflexion. » Il obtient finalement en 2001 un poste réservé d'ingénieur d'étude à l'IEAC. Son activité de photographe artiste et son travail de chercheur sont intimement liés. « Je m'intéresse à la photographie non comme technique mais comme idée. Non à l'invention du XIXe de Niepce ou Daguerre mais à ses origines conceptuelles. Pour moi, la première chambre noire est la caverne de Platon2, explique le chercheur. Il faut distinguer le visuel, ce que voient nos yeux, du visible, ce que voit notre esprit. Le sens n'est pas donné seulement par les expériences visuelles, mais aussi par celles invisibles à l'œil. D'ailleurs la science n'aurait pas de sens, sans cela. » Passionné d'astronomie, Evgen raconte sa rencontre avec Peter Von-Ballmoos3, qui lui dit : « Nous autres astrophysiciens sommes tout aussi aveugles que toi, nous ne pouvons pas voir l'Univers, ce que nous voyons n'est qu'interprétations de ce que proposent nos techniques. En science, c'est très souvent le cas. » Comme pour prouver sa non-singularité, il ne cache pas ses yeux derrière des lunettes noires et d'ajouter : « la cécité est un problème universel. » Persuadé en cela que « les aveugles ont des connaissances à proposer aux voyants », il poursuit :
« laisser le champ libre aux autres perceptions permettrait un enrichissement de leur regard, une ouverture à de nouvelles interprétations, qui, sous le poids démesuré du “visuel”, ne peuvent se frayer un chemin. »
Comment réalise-t-il ses portraits ? En évaluant les distances avec ses bras et en utilisant l'autofocus de son Leica pour la mise au point. Mais on reste surpris devant le cliché qu'il réalise en 1997 de la comète de Hale-Bopp. Il juge le résultat de ses prises de vue en les faisant décrire par sa nièce ou ses amis. Cet homme bienveillant au visage paisible, au regard bleu, au collier poivre et sel, garde un certain mystère. « J'ai été invité à Marseille comme membre du jury pour des œuvres vidéo d'artistes contemporains, on me racontait les films, explique-t-il. Un pianiste aveugle était aussi invité, poursuit-il d'un ton admiratif, on lui a demandé d'improviser sur les films muets. » Silence. « C'est cela que j'appelle l'intelligence suprême. » Et Evgen
© E. Bavcar / CNRSComète de Hale-Bopp photographiée en 1997 en Slovénie par Evgen Bavcar.
d'ajouter : « Au CNRS je retrouve cette ouverture où l'on donne la parole à ceux qui peuvent parler beaucoup plus de l'intérieur. »
Stéphanie Belaud pour le journal du CNRS
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Yoshiko est une amie photographe, elle a réalisé un travail sur l'univers des aveugles avec pudeur et poésie:Ce reportage est source de son travail et de sa créativité ; du réel elle bascule dans la fiction et le conte (de fées ?).
Sa première histoire sera en braille, en noir et blanc, dans l’univers des non-voyants.
Installée à Paris depuis 1991, Yoshiko Murakami étudie la photographie et rencontre son sujet, celui des aveugles. Mais que dire face à des images pointillistes ou pointillées, face aux discours fondés sur la réalité. L’environnement des personnes non-voyantes devrait être paradoxalement l’invisible, l’obscurité, le noir ou le vide. Yoshiko entre dans cet univers des sens, rempli de noir et blanc, tel un monde d’images sans doute sans couleurs si ce n’est celles de la poésie, de l’imaginaire. Elle nous révèle le lien qui se crée entre le point braille du texte et le grain argentique de la photographie. La vision du non visible devient la réalité pour le voyeur qu’est Yoshiko.
livre édité chez Actes Sud avec le soutien de la fondation HSBC pour la photographie_______________________________________________________________________________________
© Jane Evelyn Atwood
J'ai eu l'occasion de rencontrer plusieurs fois Jane Evelyn Atwood, une photographe engagée qui a toujours refusé "l'aveuglement". Elle a raconté et photographié de nombreuses histoires d'êtres humains pris dans la tourmente du destin, sida, prison, légion étrangère, prodstitution. Elle a réalisé un reportage sur les aveugles qui lui a valu le premier prix Eugène Smith.
Jane Evelyn Atwood est née à New York en 1947 et vit en France depuis 1971 Elle à d'abord travaillé dans la tradition de la photographie documentaire, et parfois pendant de longues périodes. sur des individus ou des groupes de gens en marge de la sociéte. Elle est i'auteur de cinq livres, dont deux consacrés a des
prostituées à Paris, un à la Légion Étrangère française, et "Extérieur nuit", paru dans la collection Photo Poche Société, aux éditions Nathan, sur les aveugles. En 2000 sort "Trop de Peines, Femmes en prison", aux éditions Albin Michel ("Too Much Time, Women in Prison'', chez Phaidon Press Ltd).
Différents prix internationaux ont distingué ses travaux en 1980 elle à été lauréate de la prernère bourse de la Fondation W. Eungene Smith pour son sujet sur les aveugles. Son reportage''Jean Louis, vivre et mourir du
Sida", à I'occasion duquel elle a accompagné jusqu'à sa mort l'hornrne qu'elle photographiait, lui a valu en 1987 un prix de la Fondation du World Prese Photo d'Amsterdam. Elle a reçu en 1990 le Grand Prix Paris Match du Photojournalisme pour un sujet sur les prisons de fernrnes en Urss qui
lui a valu également le prix du Canon Photo Essay 1991. En 1994 une bourse de 1a Fondation Hasselblad en Suede ainsi que le Ernst Haas Award, organisé par le Maine Photographic Workshops, aux Etats-Unis, lui permettent d'etendre son travail sur les prisons de femmes à plusieurs pays
dans le monde. En 1996, elle gagne le Grand Prix du Portfolio, decerné par la SCAM (Société Civile des Auteurs Mullimédias). Leica Camera lui attribue le Prix Oscar Barnack pour ce travail sur des prisons en
1997, et en 1998, elle gagne un Prix Alfred Eisenstadt. Cette méme année, I'ensemble de ses images sur les prisons de femmes est exposé pour la premiere fois à la Maison de la Villette dans le cadre du Mois de la
Photo à Paris.
prison de femmes © jane evelyn atwood
tellement d'actualité malheureusement
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